Cour de cassation, 1ère civ, 19 mars 2025, Pourvoi n° 23-17.696
Par cet arrêt du 19 mars 2025, la Cour de cassation retient pour la première fois la responsabilité de l’expert judiciaire en raison de ses conclusions imprécises.
En l’espèce, la requérante avait acquis une maison le 18 décembre 1997 et se plaignait de désordres. Elle avait alors sollicité une expertise en référé et assigné en garantie décennale les vendeurs et maîtres d’œuvre.
Cependant, ses demandes avaient été déboutées par un arrêt du 11 janvier 2011, devenu irrévocable suite au rejet du pourvoi en appel formé contre celui-ci.
En outre, le 10 février 2017, la plaignante a assigné en responsabilité et indemnisation l’expert et ses assureurs. Les défendeurs opposaient une fin de non-recevoir et une demande de condamnation pour procédure abusive.
Néanmoins, la Cour de cassation précise dans son considérant n°9 que :
« L’expert judiciaire engage sa responsabilité à raison des fautes commises dans l’accomplissement de sa mission, conformément aux règles de droit commun de la responsabilité civile. »
De cette façon, l’expert judiciaire peut voir engager sa responsabilité sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.
Pour rappel et en droit, l’article 1240 du Code civil dispose que :
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
Or, la Haute juridiction souligne que la Cour d’appel avait souverainement rejeté la demande de la plaignante au motif d’une absence de preuve d’un dommage portant atteinte à la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropre à sa destination dans le délai légal de dix ans.
En outre, la Cour d’appel avait motivé sa décision en indiquant que cette problématique probatoire résultait pour « partie du caractère hypothétique et imprécis des conclusions de l’expert, non étayées par des investigations sur la cause des désordres »
Par conséquent, les juges du quai de l’horloge considèrent que l’expert a commis une faute au sens de l’article 1240 du Code civil.
Il engage donc sa responsabilité du fait de la perte de chance d’obtenir gain de cause en justice, évaluée par les juges à 40%.
Il faut donc retenir de cet arrêt que désormais, l’expert judiciaire rendant des conclusions imprécises ayant pour conséquence une perte de chance d’obtenir gain de cause en justice, commet une faute entraînant un préjudice et peut alors voir sa responsabilité civile engagée sur le fondement de l’article 1240 par tout intéressé.